jeudi 30 septembre 2010

Coliseum / House With A Curse























Intéressons nous un peu au cas Coliseum, chouette petit groupe de Louisville, amateur de têtes de mort – au point d’en foutre sur toutes les pochettes de ses disques – et pratiquant jusqu’ici un hard core peu imaginatif (pléonasme) mais efficace (deuxième pléonasme) et burné (etc). Le genre de groupe à qui on n’en demande pas trop : ça joue vite, fort et tout droit, il n’y a pas trop de breaks, les riffs sont basiques mais gras, les rythmiques en mode mitraille et le chant est celui d’un buveur de houblon qui dégueule son ennui et sa colère du samedi soir par pur esprit hygiéniste : la bière combinée au désœuvrement c’est mauvais pour la ligne. Du punk-metal motörheadien en résumé. Après un premier album sans titre linéaire et bien raide – soit du hardcore dans la position du missionnaire – puis un mini LP (le très bon Goddamage) et No Salvation (un deuxième album bien plus convaincant encore mais aussi un passage éclair chez Relapse records qui à cette époque là ne savait plus quoi signer comme groupe pour renouveler son cheptel et redorer son blason) Coliseum est de retour avec un troisième LP, House With A Curse, cette fois ci sur Temporary Residence.
Que Coliseum se retrouve sur un label de fillettes est assez amusant mais ce qui est vraiment bizarre c’est l’évolution significative opérée par le trio de Louisville. Ryan Patterson – un ancien National Acrobat et Black Cross – et ses petits camarades ont décidé de ralentir le rythme, de varier le chant, d’enrichir les mélodies (ça ce n’était pas bien dur à réaliser) et de dégraisser leur hardcore de base. Au passage Coliseum a aussi changé de batteur, ce qui pourrait expliquer bien des choses. Le petit nouveau est un artiste alors que le précédent était un bucheron. C’est devenu un axiome, s’il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, on ne change pas non plus une équipe qui gagne, surtout lorsque, comme Coliseum, on pratique une musique peut être rétrograde et réactionnaire mais surtout complètement éjaculatoire et jouissive. Quand on n’a aucun talent pour l’écriture mais que par contre on a des poils et des tatouages, on ferait mieux de s’en contenter, de laisser parler la poudre et de monter les potards à fond. N’est pas Hüsker Dü qui veut (première vérité).
Ainsi il traine désormais dans la musique de Coliseum des relents hautement gnangnans qui donneraient presque envie de pleurer si cela ne tournait pas définitivement au carnage et donc à la grosse crise de rire : Cloaked In Red est ainsi parfaitement ridicule et qui plus est ce titre est immédiatement suivi de Perimeter Man, autre grand moment pathétique de House With A Curse. Non mais qu’est ce que c’est que ça ? Coliseum n’a pour l’instant clairement pas les moyens de ses ambitions et on n’en est qu’à la fin de la première face… La seconde ne vaut guère mieux bien que Skeleton Smile redonne brièvement le sourire. En écoutant des titres tels que Lost In Groningen on ne peut pas s’empêcher de penser à tous ces mauvais groupes emo de la première (demi) heure, dans le sillage de Fugazi et du pop core d’Hüsker Dü justement, qui plombaient la moindre bonne idée de composition avec leurs pleurnicheries. Deuxième vérité : n’est pas Quicksand qui veut non plus.

[détails techniques : la pochette très laide est en relief, le LP est tiré à 2000 exemplaires non numérotés, le vinyle est noir et le pressage est de qualité médiocre, révélant un manque certain de dynamique]

mercredi 29 septembre 2010

Electric Electric - Marvin - Pneu - Papier Tigre/ double split


Après le succès rencontré par La Colonie De Vacances – autrement dit une tournée commune avec Electric Electric, Marvin, Papier Tigre et Pneu – et un passage très réussi au Grrrnd Zero de Lyon (au moins en ce qui me concerne), intéressons nous donc d’un peu plus près au double split single publié en même temps par les labels respectifs des quatre groupes (dans le désordre : Head records, Kythibong, le Collectif Effervescence et Africantape). Un chouette objet si on arrive à faire abstraction de l’illustration de la pochette aussi moche que celle d’un album de Clara Clara mais qui aura l’immense mérite de ravir vos enfants si jamais vous avez eu la malencontreuse idée de vous reproduire. Oh et puis peut être aussi qu’elle vous plait cette putain de pochette, tout le monde a le droit d’avoir des goûts de merde.
Chaque groupe occupe une face et chacun y est allé de son inédit. Pas un inédit à la petite semaine genre une prise live lors d’un concert pourri en salle des fêtes ou une version dite alternative d’un titre déjà connu et donc rabâché. Un vrai inédit. Enregistré tout exprès. Joie.























Face W comme Perroquet. C’est Electric Electric qui ouvre le bal avec un My Athlet bien dans la tonalité de l’album Sad Cities Handclappers des strasbourgeois et de son post pounk discoïde turbopropulsé à la caisse claire martiale. Boucles de guitare, zigouigouis synthétiques, mélodie caracolante, break noisy et c’est partie pour une bonne suée et le concours de t-shirts mouillés de rigueur. Le son n’est malheureusement pas aussi volumineux que la musique d’Electric Electric le nécessite mais on s’en accommodera.
Face A comme Koala, Marvin remporte avec Copaincabana la palme du jeu de mot le plus débile de l’histoire mondiale des doubles split singles – c’est de l’humour montpelliérain ? – mais rassure tout de suite avec un titre qui lui aussi n’aurait pas démérité sur le dernier album en date du groupe, Hangover The Top. Batterie locomotive, riffs de guitare heavy, chant de castra non vocomurderé mais quand même bizarrement trafiqué, synthé kitchoune et entrain collectif qui raviront les amateurs du groupe (wow c’est la fête !) et hérisseront ses détracteurs (beurk c’est la fête !).
Face G comme Panthère : gonflés à bloc les Pneu, telle leur habitude, éclatent tout le monde avec un No I’m Not enregistré dans le local de répétition du duo et mixé à la va comme je te pousse sur l’ordi du guitariste pendant une pause clope. Le son n’est pas excellent, un peu étroit, mais suffisant pour bien rendre compte de la folie contagieuse d’un groupe que de toutes façons il faut absolument découvrir en live.
Face Y comme Panda. Ce sont mes chouchous de Papier Tigre qui clôturent magistralement ce disque avec un Intelligent Horses peut être une chouille plus musclé qu’à leur habitude et en tous les cas toujours aussi exceptionnellement bon. A ce sujet, on ne saurait trop vous recommander une énième fois l’écoute attentive de leurs deux albums parus au Collectif Effervescence. Ce sont eux les nouveaux maitres du monde, on vous aura prévenus.

[vous ne me croyez pas ? et bien vous pouvez écouter l’intégralité de ce double 45 tours ici, vous pourrez ainsi vous en faire une idée par vous-même et oui, je le concède, vous venez de perdre 75 précieuses secondes de votre existence à lire cette chronique techniquement désuète et donc résolument inutile]

mardi 28 septembre 2010

Aujourd'hui, je ne fais rien
















Certes on ne fait pas toujours ce que l’on veut dans la vie mais c’est quand même la mort dans l’âme que j’ai du renoncer à me rendre à la release party de l’album I Can Walk With My Broken Leg de The Good Damn, concert pourtant dûment annoncé ici. La poisse. Ou plutôt une faille spatio-temporelle dans l’organisation interne de l’activité familiale. Bref.

Il n’y aura donc pas de report enflammé ni de photos floues de ce concert sur 666rpm mais fort heureusement le webzine concurrent mais néanmoins ami Dark Globe était lui bien présent et vous pouvez lire son report ici (et admirer au passage une vidéo filmée par ses soins). Donc je ne fais rien aujourd’hui. Ça me fera des vacances. Mais merde quand même.

lundi 27 septembre 2010

Chapelle 59 / self titled























En attendant un éventuel nouvel album de Ned et une reprise d’activité conséquente de nos losers lyonnais préférés – rassurez-vous, ce nouvel album de Ned existerait bel et bien : j’ai parlé à l’homme qui a parlé à l’homme qui a parlé à l’homme qui a parlé à l’homme qui a enfin pu en écouter quelques bouts – on peut se consoler avec les projets annexes de Nico Poisson, son guitar-hero : Sathönay (un duo de noise folklorique)* et Chapelle 59 dont il va être ici question. Découvert il y a une petite éternité et complètement par hasard à un concert protéiforme dont seul un certain organisateur local dont je tairai le nom en a le secret, jamais revu depuis, Chapelle 59 est un trio regroupant un guitariste de Ned (donc), un guitariste de Vialka (qui joue en fait de la guitare baryton) et d’un batteur toujours aussi complètement inconnu de nos services à l’heure où je vous parle et habitant parait-il aux limites du confort rassurant de la civilisation occidentale moderne, au milieu d’une forêt d’Europe de l’est. Cela explique sûrement pourquoi je ne les ai pas revus depuis, et ce à mon grand regret. C’est dire aussi si le trio ne doit pas non plus répéter tous les jours. Peut être même qu’il n’existe plus vraiment. Aucun lien internet** ne permet d’en savoir plus sur l’état de décomposition avancée ou non de Chapelle 59. Tout comme aucune indication figure au dos de ce single DIY publié en totale autoproduction ***.
Que le groupe ne répète pas beaucoup, cela n’a en vérité aucune conséquence. Les trois Chapelle 59 pratiquent un instru noise éruptif, devant beaucoup aux fanfaronnades et foutraqueries des groupes affiliés à Skingraft. Certains passages – tous ? – ont clairement l’air improvisé et tout ça virevolte, monte en flèche, redescend en piqué, se plante dans les virages, redresse la barre in extremis, repart de plus belle, etc. A des brides de riffs d’AC/DC passés au mixeur succèdent des tronçons de US Maple arrachés avec les dents. Le rendu – immédiat et spontané – est des plus réjouissants. Dans notre grande série Avis de Recherche, j’aimerais au passage bien savoir si Mirco, le batteur, joue dans un autre groupe et si oui lequel parce que ce bonhomme est tout simplement hallucinant****. Que ce soit sur Bring Me A Beer (face A) ou sur Metal This Morning (face B) ce jeune homme est à la fois le cordon sanitaire, la cheville ouvrière et le ver dans le fruit qui permet tous les délires des deux guitaristes qui ne s’en privent donc pas.
Seul regret, la relative petitesse du son : les deux titres de ce single ont été enregistrés au Grrrnd Zero par un des sonorisateurs de l’équipe du lieu, on se doute bien qu’il a fait tout ce qu’il a pu mais on aurait préféré un peu plus de tranchant dans le rendu général. C’est un peu dommage mais cela n’entache que brièvement le plaisir de l’écoute… Vous en voulez encore ? Oui ? Cela tombe bien, le recto de la pochette indique inclus Live In Lyon CD. Peut être bien un enregistrement de ce fameux concert évoqué plus haut. Mais j’ai eu beau chercher, secouer la pochette de ce 45 tours dans tous les sens, aucun CD n’en est sorti… REMBOURSEZ !

*groupe que les lyonnais auront le plaisir de revoir en concert en première partie de Chevreuil le 22 novembre au Grrrnd Zero de Vaise
** en fait si mais ce n’est vraiment pas grand chose
*** encore une erreur du chroniqueur : il semblerait bien que ce single soit désormais inclus au catalogue de S.K. records, le label de Mr Poisson
**** la réponse est oui : ce groupe s’appelle Lem Phago mais aucune info à son sujet

vendredi 24 septembre 2010

The Good Damn en concert, ce soir !
























Petit rappel : c’est ce soir qu’a lieu pour les lyonnais la release party de l’album I Can Walk With My Broken Legs de The Good Damn.

Cela se passe au Foxtrot (9 rue Renan, Lyon 7ème) avec au programme, en plus des héros de la soirée : Blackthread, Mensch et les DJettes de Sauce Gribiche.

Début de la soirée à 20h30 et surtout, il s’agit d’un concert gratuit, qu’on en profite !

jeudi 23 septembre 2010

Torche / Songs For Singles























Nouvel enregistrement de Torche, un mini album cette fois – huit titres, vingt minutes – du nom de Songs For Singles (toujours chez Hydra Head) et le premier disque du groupe mis en boite par le line-up à trois*. On ne compte pas King Beef , sorti un peu plus tôt dans l’année via un split avec Boris, Chapter Ahead Being Fake. Quand je dis qu’on ne compte pas King Beef, c’est plutôt qu’il faudrait carrément oublier ce titre qui est pourtant l’un des meilleurs jamais enregistré par Torche : King Beef s’imposait facilement par sa lourdeur tellurique, les titres de Songs For Singles sont au contraire un retour au pop metal du deuxième album de groupe, l’excellent Meanderthal. J’en vois déjà qui grince des dents, l’option Beach Boys vs Black Sabbath de Torche ayant fortement déplu à certains à l’époque – ce qui a valu (et vaut toujours) au trio des comparaisons fort peu flatteuses avec la fange la plus radicalement niaise des groupes de hardcore mélodique, NoFX en tête.
Neanderthal avait néanmoins réussi son pari d’un metal ultra cheesy quant à ses mélodies de chant (avec des refrains parfaits pour être repris en chœur) ou ses breaks sautillards mais toujours incroyablement lourd, dense et tranchant musicalement. Il n’en est pas vraiment de même pour Songs For Singles qui reprend la même recette en y ajoutant un peu plus de crème. Problème : la crème ça affadit toujours et Songs For Singles, malgré le démarrage relativement bon de UFO, a ces airs faussement enjoués, même franchement forcés, qui a à longue finissent par devenir pathétiques. On n’a plus envie de rire. Ni de sauter en l’air. Ni d’en reprendre une énième dernière pour la route. Bref, on s’emmerde et Songs For Singles s’enfonce peu à peu dans la facilité médiocre et le vanille-fraise aseptisé. La fin du disque – Face The Wall, très lent et soporifique et Out Again, très mid tempo autoroutier – vire à la débâcle totale. Presque un virage FM. Comme si Torche voulait à tout prix coller au cul du succès facile et sans lendemain. Ils vont avoir besoin de papier pour s’essuyer.

* puisque Juan Montoya, guitariste fondateur, a au grand dam des fans quitté le groupe en 2008 mais en concert il est désormais remplacé par un guitariste supplémentaire, histoire que Torche reste à la hauteur de sa réputation de groupe supersonique

mercredi 22 septembre 2010

Lyon vs Brooklyn : 2 - 0























Après deux jours passés au Grrrnd Zero – ses concerts festifs, ses bastons, ses saboteurs et son sixième anniversaire célébré dans le bruit et la fureur – retour au Sonic pour un concert (organisé par Ostrobotnie) dont l’éclectisme n’a rien à envier à celui des collègues anoraks : Julien Dupont (bidouille multidimensionnelle), Sheik Anorak (que l’on ne présente plus) et la découverte du jour, Liturgy, un groupe de black metal basé à Brooklyn et entouré d’une aura arty très couleur locale. Le groupe sort ses albums chez 20 Buck Spin, a été produit par Colin Marston (Dysrhythmia, Krallice, etc…), autant d’éléments réconfortants qui laissaient à penser que Liturgy – malgré un nom ridicule – allait faire passer au public lyonnais une excellente soirée. C’est fou comme on peut se tromper, parfois.
Le public lyonnais, justement, n’est pas venu en nombre, comme à chaque fois lorsque joue un groupe de metal intello/arty (genre Wolves In The Throne Room) : les true métallurgistes, les vrais, les purs et les durs ne se déplacent que rarement pour tester la musique que les tapettes binoclardes dans mon genre appellent metal, confirmant ainsi qu’ils sont aussi réacs que les mauvaises langues le disent. D’un autre côté il faut bien avouer aussi que pour rien au monde je ne me déplacerais à un concert de chevelus bardés de cuir, gonflés de sexisme et galvanisés à la testostérone. Plus que jamais, le monde se divise en deux catégories.























Place à Julien Dupont, jeune homme fort discret déjà vu plusieurs fois en concert – seul ou avec Motherfucking. Il joue dans le noir quasi complet, par terre, accroupi au milieu d’un attirail assez invraisemblable composé d’une guitare, d’objets divers et variés (barres métalliques, etc), de pédales d’effets, de binious tibétains, d’un micro, d’un sampleur et autres boites magiques. Je les entends déjà les énervés de la guitare et du binaire coreux : oui Julien Dupont va jouer ce que communément on appelle désormais du drone, qualificatif sous lequel on place n’importe quelle musique à partir du moment où elle est ambient, mouvante ou atmosphérique.
Celle de Julien Dupont est bien plus que ça. Déjà ses attaques et changements de plans sont francs du collier, il n’est pas question ici de ramollissement baba-zen post transcendantal. Les structures élaborées par Julien sont toujours vives, parfois ardues, dynamiques et ne laissent aucune place pour les trous d’air. Je ne sais pas comment il arrive à générer tout ce magma à la fois bruyant et planant (puisqu’il joue dans le noir) mais le résultat est entièrement convaincant et totalement captivant. Pour être franc – une fois n’est pas coutume – c’est même la première fois que je n’ai aucune réserve à émettre sur sa musique.
















Suit Sheik Anorak. Notre héro local préféré au monde. Or il se trouve que Sheik Anorak a commencé à en avoir un peu marre de jouer ses noise songs catchy et inventives : c’est toujours la même histoire avec les artistes, ils ne sont jamais contents d’eux ni satisfaits de leurs résultats, même lorsqu’ils sont excellents. Sheik Anorak a donc entrepris de monter un tout autre set que celui qu’il fait tourner en concert depuis déjà quelques mois. Nouvelles compositions et nouvelles façons de faire. Une décision lourde de conséquence d’autant plus qu’elle a été prise peu de temps avant la date du concert d’aujourd’hui. Une façon comme une autre de se mettre la pression. Evidemment, l’info a quelque peu filtré dans les milieux autorisés, des attentes – en provenance directe des nombreux fans hystériques de Sheik Anorak et ils sont nombreux – sont apparues et la pression est aussitôt monté d’un cran supplémentaire.
Pour faire vite, Sheik Anorak a joué un seul titre d’une vingtaine de minutes passant d’une intro bruitiste et minimale à des motifs martelés, déchirants et ultra répétitifs. Ce ne sont plus les mélodies (même un tantinet bruyantes) qui caractérisent ce Sheik Anorak là mais bien l’entêtement jusqu’au tournis hystérique d’un flot strident qui vous arrache des soupirs d’agonie satisfaite. On pense plus d’une fois à Athletic Automaton et ce genre de foutraqueries post Arab On Radar entre noise pyrolysé et aridité électrostatique.
La seule chose est que Sheik Anorak est obligé avec ce nouveau set de préparer ses parties de guitares – plus complexes – avant le concert, on ne le voit donc plus trop avec son instrument en train de faire ses boucles en direct et le rendu est donc quelque peu moins ludique et moins rigolo mais hormis cette réserve purement secondaire et égoïste on peut affirmer que notre homme a bien fait d’avoir envie de changements, qu’il a su mener ces changements dans une nouvelle direction passionnante et que désormais il sait que Sheik Anorak n’est pas un projet figé ou voué à la stagnation.
















Dernier groupe de la soirée, Liturgy. Un groupe de black metal made in New York. Ne riez pas. Les gars sont très jeunes et très sympathiques : j’arriverai même, avant le concert, à avoir une simili conversation – en anglais s’il vous plait – avec le batteur du groupe à propos de Weasel Walter (qu’il adule), du set de Sheik Anorak (qu’il a aussi beaucoup aimé), du trio free qu’ils forment tous les deux avec Mario Rechtern (et dont il a beaucoup entendu parler) et de la marque de cigarettes que je fume (il en profite pour m’en taxer une, sale musicien pauvre).
Sur scène c’est tout autre chose. J’ai lu quelque part à propos de Liturgy un descriptif à la con du genre black metal vs Steve Reich. J’ai eu beau chercher, je n’ai pas trouvé la moindre trace de Stevie dans la musique de Liturgy. Laquelle est un black metal surpuissant – le batteur est incroyable, condition essentielle pour tout groupe de metal mais ce ne sera pas suffisant – joué à burnes. Tellement à burnes que les plans alambiqués du guitariste passeraient presque inaperçus. Par malheur le bassiste qui joue à l’instar de ces petits camarades comme une brute a aussi zéro présence sur scène mais le pompon revient au guitariste/chanteur qui a le charisme d’une huître et une allure qui me fait bien trop penser à Evan Dando. Liturgy n’arrive donc que très moyennement à recréer sur la scène du Sonic l’horrible déferlement inhumain de ses enregistrements.
Je laisse tomber le groupe et le public de plus en plus clairsemé, sort sur la terrasse du Sonic et me retrouve à converser sur les meilleurs films débiles des années 80 – Meet The Feebles vs Street Trash –, la filmographie commentée de John Cassavetes ou les répliques cultes du Bon, La Brute et Le Truand. Nous y revoilà donc : le monde se divise en deux catégories : ceux qui ont un pistolet, et ceux qui creusent. Toi, tu creuses. Allez, pan dans la gueule ce sera pour une autre fois.

lundi 20 septembre 2010

Du sax, des bits, du sexe et du fun

















Vendredi 17 septembre : deuxième et dernier concert pour le sixième anniversaire de Grrrnd Zero, cela se passe toujours au Rail Théâtre de Lyon Vaise et l’affiche proposée est au top de l’éclectisme made in Grrrnd Zero : Andy Moor (de The Ex) et Christiane Sehnaoui pour un duo d’improvisation free, DVD (batterie et Wii), Chevignon (grind noise sexuel) et Melt Banana (Nintendo core). Comme la veille le Rail Théâtre va être bien rempli : Melt Banana continue de rameuter du monde alors que les japonais ne proposent rien de réellement neuf depuis des lustres, il parait qu’ils seraient même en pleine voie de ramonisation.
La soirée s’annonce donc belle. J’évite consciencieusement les tables de marchandising même si ce split 10 pouces de Mary Poppers et Chevignon sorti il y a une éternité chez S.K. records dans la collection des Douze Salopards me fait toujours autant de l’œil. Je n’ai jamais craqué depuis tout ce temps mais je reste aussi un peu surpris qu’il en reste encore en vente libre.
















En attendant que la salle se remplisse un peu Andy Moor et Christine Abdelnour Sehnaoui montent sur scène. Lui on ne le présente plus : guitariste de The Ex depuis le début des années 90, auparavant guitariste des miraculeux Dog Faced Hermans – un groupe à découvrir ou à redécouvrir d’urgence – et on en passe sur tous ses autres projets, multiples collaborations, etc. Elle je n’en avais jamais entendu parler, elle joue du saxophone alto (depuis environ 1997) et a partagé la scène avec tellement de musiciens et de musiciennes œuvrant dans les musiques improvisées qu’elle a un curriculum vitae aussi long que mes deux bras ou que l’étrange tuyau qu’elle a enfilé dans son saxophone pour en jouer.
Le duo est une agréable surprise, le jeu d’Andy Moor, sa façon unique d’appréhender la guitare, le son particulier de son instrument (qu’il aime bien désaccorder en jouant directement sur les clefs) on connaissait déjà mais donc la nouveauté vient de Christine Sehnaoui et de son phrasé subtil et délicat. Les deux musiciens s’expriment et dialoguent plutôt avec modération, pas de tornade free ni d’effervescence douloureuse pas plus qu’ils ne s’éternisent ou ne se complaisent dans l’étalage virtuose. La musique du duo reste toujours simple et immédiate et j’aime aussi imaginer qu’elle a été capable de réconcilier avec plus de free tout comme elle a été capable de séduire les fanatiques des très carrés Melt Banana venus en nombre ce soir. Un set assez court (deux improvisations) et c’est déjà fini.
















D.V.D., un acronyme qui signifie Drums, Video & Drums. Ils sont japonais et ont mis au point un petit show interactif qui va divertir son monde cinq minutes mais pas plus (le problème étant qu’ils vont jouer bien plus longtemps que ça). Au milieu de la scène un écran. A gauche un batteur. A droite un second batteur. Et perdu quelque part au fond une troisième personne dont on se demandera ce qu’elle fait exactement mis à part avoir les yeux rivés sur son laptop et jouer avec une télécommande.
Le principe est simple : les deux batteurs jouent (encore heureux) et semblent déclencher des sons annexes et surtout des images apparaissant en interactivité sur l’écran. C’est assez amusant, frais, rigolo et ludique mais cela devient très vite lassant. Une fois que les deux batteurs se sont échauffés sur un premier titre qui met en scène un flipper géant, tout est dit. Et les images provenant de l’écran dévoilent souvent toute la laideur dont le monde numérique est de nos jours capable. Et la musique ? Et bien… une sorte d’electronica rebondissante, froide mais fleuri allant du glitch à la techno minimale. Un concert certainement bien plus amusant pour ceux qui le font que pour ceux qui y assistent.
















Avec Chevignon (dans la version 2010 du groupe) je m’attendais à de l’explosif et je vais être servi. Le groupe joue clairement sur la provocation : avec des titres de chansons tels que Dans Ta Chatte et des paroles comme avec ma moustache je vous encule à sec on sait à quoi s’attendre… et bien pas vraiment. Entre ceux qui ont réagi aux roses accrochées aux pieds de micro (c’est quoi ces gauchistes ?), ceux qui ont pris le groupe pour des fachos (bouh le chanteur il a un brassard bleu-blanc-rouge), celles et ceux qui ont pris les paroles sexistes au tout premier degré c'est-à-dire pour un insulte écœurante aux femmes et les autres qui y voyaient au contraire une dénonciation par l’exemple le combat a été rude. Je passe encore sur les olibrius qui parait-il auraient tenté de débrancher la sono.
Le chanteur est à peine monté sur scène et a à peine entonné Chevignon/La marque au canard/Le canard est mort/Mais les connards sont toujours là qu’il se prend quelques jets de bières en provenance du public et les insultes fusent de part et d’autre. Plus tard, sans que je comprenne exactement comment tout a commencé ça se bastonne direct dans la fosse, l’un des deux guitaristes de Chevignon saute dans le public et l’hystérie et la violence du concert déjà bien palpables deviennent explosives. Un grand happening, une performance collective comme je n’en avais pas vue depuis des années, la baston générale en guise de concert.
Que l’on soit d’accord ou pas avec Chevignon, que l’on soit choqué ou non par les textes, force est de constater que la technique mise au moins par Jello Biafra (se mettre, au niveau de ses paroles, dans la position du salaud intégral au lieu de dénoncer avec des slogans au premier degré) fonctionne toujours aussi bien. Seulement comme de l’autre côté Chevignon ne pratique vraiment aucun didactisme et que le chanteur possède un talent certain pour se faire haïr et pour se faire traiter de gros connard, cela passe donc très mal avec pas mal de gens. Il y a encore du boulot à faire. Et pour un descriptif complet de la musique du groupe, je vous renvoie directement à son monospace, puisque le concert a été gâché. On va dire que c’était la même chose mais en bien plus fort. On en reparlera une autre fois.
















Arrivent les japonais de Melt Banana. Ils mettent un temps fou à s’installer et après l’ambiance pourrie du concert de Chevignon l’excitation est à son comble. Melt Banana c’est aussi le spectacle assuré et le défouloir pour tous. J’ai écrit plus haut que le groupe ne propose plus rien de nouveau depuis des lustres et bien j’ai eu tort. Le concert démarre avec uniquement Yako et Agata (soit respectivement la chanteuse et le guitariste de Melt Banana) tous seuls sur la scène. Yako chante et utilise son pad désormais habituel – elle l’avait déjà la fois précédente – tandis qu’Agata utilise un laptop et un pad lui aussi. Les deux jouent dans le noir, juste avec une lampe frontale qui leur donne des airs de fantômes. Je comprends alors qu’en première partie Melt Banana joue dans sa version lite, celle que l’on avait pu découvrir en écoutant le Live version.0.0. Alors que le disque n’était pas très intéressant Melt Banana Lite est plus convaincant sur scène bien que ce fut un poil trop long.
Arrivent ensuite bassiste et batteur et c’est parti pour un vrai concert du groupe. Cette fois rien de nouveau, Agata est toujours ce guitariste maniaque, précis, efficace et tranchant. Melt Banana est définitivement une machine bien huilé, le concert de ce vendredi soir était quasiment la copie conforme de celui que le groupe avait donné au même endroit il y a deux ans et les japonais ressortent leur armada de tubes (anciens et nouveaux) pour le plus grand bonheur de leurs fans surexcités. Ils nous refont même pour la énième fois le coup des dix compositions jouées en deux minutes, haha ha.
Il est donc arrivé à Melt Banana ce qu’il est arrivé à The Locust : les concerts du groupe se sont transformés en performances ultra carrées et prévisibles, le fun en plus. Ce fun a toujours été un côté non négligeable chez Melt Banana mais je préférais lorsque le groupe mélangeait son sens du cartoon à un côté plus rêche et plus punk. Trop de gimmicks mis en scène tuent la musique mais ce fut l’occasion d’une belle suée et l’unique tentative mensuelle de faire un petit peu de sport. Mais je ne suis pas sûr cependant que j’y retournerai la prochaine fois, à moins d’être réellement en manque.

samedi 18 septembre 2010

Marvin, Papier Tigre, Electric Electric et Pneu : la colonie de vacances à Grrrnd Zero























La colonie de vacances. C’est comme ça que Electric Electric, Marvin, Papier Tigre et Pneu (quatre des meilleurs groupes français actuels option je fais du bruit, je saute dans tous les sens et j’aime ça) ont décidé d’appeler leur tournée commune, soit une petite dizaine de dates en France au mois de septembre 2010. De quoi franchement rigoler, entassés à dix-sept dans deux ou trois camions vénérablement pourris. De la bonne ambiance et de l’éclate comme seules feuilles de route.
Les labels Africantape, le Collectif Effervescence, Head records et Kythibong se sont en outre réunis pour éditer un double 45 tours comprenant un inédit de chaque groupe enregistré spécialement pour l’occasion (avec des réussites variables, on en reparlera), sorte de carte postale de cette tournée d’automne.
La colonie de vacances s’est donc arrêté le 16 septembre à Lyon, au Rail Théâtre/Grrrnd Zero de Vaise, avant-avant dernière date d’un périple qui a emmené tout ce petit monde de Limoges à Paris en passant par Nantes, Strasbourg ou Freiburg (seule date allemande) pour finir à Toulouse via Marseille. Détail qui ne gâche rien, le Grrrnd Zero profite de cette date exceptionnelle pour fêter son sixième anniversaire – on est encore loin de l’âge de raison mais on y arrive tout doucement. L’affiche, la date anniversaire ainsi qu’un prix des places résolument attractif sont très certainement la cause d’un Rail Théâtre rempli à bloc. Cette soirée va être complètement folle. Et qu’importe si j’ai déjà vu ces quatre groupes plusieurs fois en concert.
En bons kolkhoziens, les quatre groupes jouent dans un ordre différent chaque soir. Ils ne tirent pas au sort comme je l’avais cru au départ mais ils tournent, tout simplement. C’est ce qui explique que les Marvin jouent en premier ce soir alors que la veille ils avaient joué en dernier. Vu la renommé grandissante du groupe, beaucoup s’attendaient à ce que les Montpelliérains soient systématiquement en tête d’affiche mais il n’en est rien. Comme je connais un certain nombre de soiffards qui ne se déplaceront que pour absolument voir Marvin en concert et qu’à cette heure là ils doivent encore être scotchés en terrasse je passe un ou deux coups de téléphone pour prévenir les intéressés du bordel. D’un autre côté, cette façon de faire désacralisée et communiste d’organiser le passage des groupes sur scène me fait particulièrement rire et, après tout, on a déjà vu Marvin au même endroit en premier partie des Thugs pour leur reformation éphémère en 2008.
















C’est donc devant un public encore un peu clairsemé que Marvin commence à jouer. Le groupe va avoir la tâche assez difficile de chauffer la salle. Dehors la queue pour pouvoir entrer est interminable. On peut dire ce que l’on veut du bitch disco noise hard rock kraut instrumental* du groupe et que l’on aime ou que l’on n’aime pas Hangover The Top, le deuxième album de Marvin paru cette année, on ne peut pas nier que le trio en connait un rayon sur comment mener un concert à bien et surtout comment le transformer en grosse fête. Non seulement le groupe possède un répertoire complet de hits incontournables mais qui plus est sur scène ces trois jeunes et beaux athlètes envoient la sauce avec une fraicheur et un enthousiasme parfois sidérant. Le plus spectaculaire est Fred, guitariste mais aussi maintenant clavier et chanteur, qui a fait des progrès de géant, il monopolise pas mal de l’attention alors que jusqu’ici c’était plutôt Emilie** (synthés et voix) et Greg (batterie et ventre plat) qui attiraient les regards. En plus on sent bien qu’il s’amuse comme un petit fou, il a constamment un air de sale gosse.
On admettra par contre que – fidèle à ses habitudes – le public lyonnais met lui du temps à l’allumage et lorsqu’il s’est enfin réveillé (et la salle presque complètement remplie) il est déjà temps pour Marvin de laisser la place au groupe suivant. Un dernier titre (Conan Le Bastard dédicacé comme il se doit aux amis de Zëro) en guise de rappel et c’est fini, tant pis pour les retardataires et les piliers de comptoirs***.























Le groupe suivant n’est autre que Papier Tigre. Après le concert, lors d’un échange d’impressions, je disais à un autre adorateur de ce trio nantais que je ne comprenais pas pourquoi ces trois garçons n’étaient pas des stars mondiales du rock indépendant connues de tous et pourquoi ils ne vendaient pas leurs albums par semi-remorques entiers. Le lendemain matin, la première et unique chose définitivement urgente à faire a été de ressortir les deux LPs du groupe, le premier sans titre et The Beginning And End Of Now et de les réécouter avec autant de passion que lors de leur première découverte.
Tous les groupes de l’escale lyonnaise de la colonie de vacances ont été bons mais Papier Tigre a surclassé tout le monde et de loin bien que la musique du trio soit la moins évidente par rapport à celles jouées par ses trois petits camarades : mélodies curieusement tordues mais mystérieusement catchy, mesures impaires, breaks incroyables, batteur complètement impressionnant, guitaristes incisifs, chanteur haut perché mais toujours une musique fluide, coulant de source. Un vrai bonheur, autant pour les yeux que pour les oreilles et que pour le cœur.
















Arrivent les trois Electric Electric (de Strasbourg) qui avaient fait une très grosse impression au Sonic en octobre 2009. Ici, la recette disco noise du trio est exactement la même, ultra efficace, ultra enlevée, mélange de groove imparable, de lignes de synthés froides, de riffs de guitares stridents, d’un peu de chant et d’un peu de tribalisme, le tout emmené par un batteur toujours aussi ahurissant de puissance, véritable moteur d’un groupe et d’une musique qui certes manquent un peu de nuances et de finesses. Mais on ne va quand même pas chipoter, hein ?
Allez si, juste un peu. Ne bénéficiant pas de l’effet de surprise, le post punk mâtiné de turbo funk de Electric Electric me surprend donc moins, voire me parait un peu moins convainquant. Surtout le groupe joue trop fort à mon goût, ce qui finit par gâcher mon plaisir et m’entraîne en dehors du devant de la scène où la jeunesse locale palpitante et frénétique danse comme une folle. Que le groupe se rassure, je ronchonne mais il y a des signes qui ne trompent pas : après le concert j’entendrai plein de commentaires sur l’excellence d’Electric Electric et croiserai plein d’heureux acheteurs avec le LP Sad Cities Handclappers du groupe sous le bras. Les strasbourgeois ont visiblement explosé les ventes.
















Le dernier groupe qui joue ce soir est donc Pneu et c’est une excellente chose. Les tourangeaux sont les plus foutraques et barrés du lot, ils ont toujours pour habitude de jouer à même le sol avec leur propre sono au milieu du public (Lightning Bolt style) et ils s’apprêtent à foutre dehors les personnes du public qui n’attendaient que ça pour ne pas rater le dernier métro. Après le volume sonore de Electric Electric celui de Pneu me parait presque faiblard pourtant il ne doit rien en être puisque JB (batterie) arbore un magnifique casque anti bruits et que certaines réactions dans le public sont sans aucune équivoque.
Les deux Pneu sont en excellente forme ce soir, oppressés par le public qui les cerne, et envoyant avec une rage punk décuplée leur math noise. Régalade de riffs tordus, batterie épileptique, rien ne les arrête si ce n’est quelques obligations administratives et légales**** – depuis que des immeubles d’habitation ont été construits derrière le Rail Théâtre les problèmes de voisinage se sont multipliés et ce soir le concert doit se terminer au plus tard à 01h00 – ce qui fait que Pneu choisira la fureur permanente et l’instabilité sonique comme seuls langages, délaissant le final heavy/sludge avec lequel le groupe a pris l’habitude de terminer ses concerts ces derniers temps et écourtant son set à la demande des personnes du Grrrnd Zero (c’est le prix à payer s’ils veulent continuer à bénéficier de la salle pour organiser d’autres concerts). Ce sera finalement une bonne chose car Pneu joue exactement le genre de musique qui ne devrait jamais s’éterniser et qu’ainsi je peux rester sur une excellente impression.

* tu es bien avancé maintenant avec un descriptif pareil
** on ne félicite par contre pas les connards priapiques et leurs remarques macho-sexistes au sujet de la jeune femme mais j’imagine qu’elle doit être blindée, depuis le temps
*** ceci est une private joke, ne cherche pas
**** et un passage des flics qui avaient l’air de se demander d’où pouvait bien provenir tout ce bordel

jeudi 16 septembre 2010

Swans / My Father Will Guide Me Up A Rope To The Sky


Allons. On peut bien pester sur les airs retro-nostalgiques actuellement empruntés par la musique, on peut bien insinuer que tous les groupes qui se reforment le font uniquement pour le fric – mais si c’est pour éviter d’aller à l’usine ou à la soupe populaire ça peut être une excellente raison, non ? – et on peut bien jouer à l’ancien (moi je les ai déjà vus et tu penses bien que c’était à leur meilleure période), il n’empêche qu’avec toutes ses reformations de groupes plus ou moins mythiques – ça dépend des goûts – il y en a forcément une qui va te faire rêver, te mettre du plomb dans le cœur et te donner envie d’écouter la nouvelle version de ce groupe que tu as tant aimé autrefois, quand tu étais encore jeune, fou et insouciant, autant dire une éternité.
Michael Gira peut bien raconter tout ce qu’il veut à propos de la remise en activité des Swans, comment les anges et la lumière lui sont apparus, on s’en moque un peu. La seule évocation du nom des Swans suffit. On connait l’histoire, les démos que Gira a enregistrées et sorties lui-même en CDr pour, disait il, se faire un peu de fric et financer l’enregistrement d’un nouvel album de l’un des deux groupes new-yorkais les plus importants des années 80. I Am Not Insane, qui finalement ne sera pas réédité, n’avait rien de mirobolant mis à part le fait d’être porteur de deux bonnes nouvelles : les Swans qui se reforment (donc) et Michael Gira vraiment en très grande forme. We Are Him, le dernier album en date d’Angels Of Light – groupe que Gira a monté après les Swans – paru en 2007 était déjà très prometteur, au point même d’être le meilleur enregistrement de ce groupe neo folk pour hippies gothiques car marquant ça et là un certain durcissement bienvenu de sa musique. Alors on finit forcément par attendre beaucoup de ce My Father Will Guide Me Up A Rope To The Sky, confiant dans les beaux restes de Gira et tout du moins heureux de pouvoir à nouveau entendre sa belle voix inimitable.



















Pour résumer la situation et en faisant très court, on peut avancer sans trop se mouiller que My Father Will Guide Me Up A Rope To The Sky s’inscrit dans la droite lignée des derniers albums des Swans tout en la combinant avec le côté plus pastoral d’Angels Of Light. Dans le détail on ne s’attendait pas non plus à autant de virulence et de lourdeur que celles que l’on peut entendre sur l’excellent My Birth et le plus basique Eden Prison. Martèlement tribal de la batterie (tenue par Phil Puleo de Cop Shoot Cop et qui avait déjà joué avec les Swans, sur la tournée d’adieu du groupe en 1997), glissés de basse typiques, tranchant venimeux des guitares (dont celle de Norman Westberg, guitariste originel du groupe et de retour au bercail) et chant incantatoire de Michael Gira : les années viande froide (1982/1986) des Swans sont loin derrière eux mais elles continuent d’influencer le groupe. Mieux : même sur les titres emprunts de cette grandiloquence épique dont les Swans se sont fait une véritable spécialité depuis le diptyque White Light From The Mouth Of Infinity/Love Of Life on est surpris par l’acharnement du groupe. Ainsi, sur l’inaugural No Words/No Thoughts ou sur Inside Madeleine – ces deux titres comportent deux parties distinctes, le fracas de la première laissant dans un deuxième temps la place aux crooneries mystiques dont Gira ne sait plus se passer – les Swans enfoncent à la fois le clou de la colère et la croix d’un romantisme musical certes un peu désuet. You Fucking People Make Me Sick représente une certaine curiosité avec ses voix d’enfants et son final aux résonnances vaguement empruntes de musique contemporaine. Jim, magnifique, est le titre qui se remarque le plus sur My Father Will Guide Me Up A Rope To The Sky : la musique des Swans y est représentée dans tout ce qu’elle a désormais de classique mais sublimé, Gira est le grand ordonnateur d’un blues gothique mais bien sûr sans paillettes sur fond de chœurs de galériens. Little Mouth fait une nouvelle fois la part belle aux voix – comme sur tous les autres titres du disque on remarque que celle de Jarboe, évincée des Swans version 2010, ne manque absolument pas – et ce titre s’achève sur une ligne de chant solo de Michael Gira, oui les Swans est bien son seul groupe.

mercredi 15 septembre 2010

Grinderman / 2























 Le plus grand talent actuel de Nick Cave c’est de faire avaler vraiment n’importe quoi à vraiment n’importe qui. Avec Grinderman on en arrive même à des summums de non-sens. Que les rédacteurs/journalistes/pisse-copies qui ne font que recopier comme des petits chienchiens le dossier de presse fourni par Mute écoutent un peu le nouvel album du groupe avant. Déjà, pour le premier, on avait eu droit à des lignes du genre le disque le plus violent et le plus sombre de Nick Cave depuis longtemps. D’autres allaient jusqu’à évoquer le fantôme de Birthday Party, groupe mythique (et important) par excellence. N’en jetez plus ! Les albums de Nick Cave post Birthday Party les plus terrifiants ne sont pas forcément les plus durs musicalement – prenez Your Funeral… My Trial, son chef d’oeuvre – et il est entendu aussi que l’australien joue depuis longtemps dans un tout autre registre que celui de l’autodestruction et du chaos forcené. Nick Cave a juste réussi à faire avec Grinderman ce qu’il est devenu incapable de faire avec ses Bad Seeds : se remettre en question voire en danger, enregistrer de la musique un tant soit peu excitante et pourquoi pas hargneuse. Grinderman 1 avait assez de qualité pour être un nouvel et bon album de Nick Cave & The Bad Seeds, un album du renouveau, mais Grinderman 1 n’en avait certainement pas assez non plus pour être ce brûlot garage et défoncé que l’on nous a tant vanté.
Et voilà que ça recommence avec 2, un album qui fonctionne exactement comme son prédécesseur : quelques titres qui arrachent – Mickey Mouse And The Goodbye Man ou Evil – pour faire passer l’étiquette « rock » de Grinderman et entre deux du délayage, du remplissage, de la mollesse, de la balade. Malgré la présence de titres vraiment très faibles (Heathen Child et son ignoble refrain, pourtant sorti en single, Palace Of Montezuma, une très mauvaise caricature des Bad Seeds pour le coup, pire que le pire) Grinderman 2 est peut être un poil de barbe au dessus de Grinderman 1. Mais il est aussi beaucoup trop produit, pour le son crade et l’ambiance écorchée il est fortement conseillé d’aller voir ailleurs. Ailleurs ? Non : conseillons plutôt à Nick Cave de virer tous les musiciens qui composent les Bad Seeds, de dissoudre son vieux groupe légendaire et de rebaptiser Grinderman Nick Cave & The Bad Seeds, comme par enchantement. Cela évitera les quiproquos à l’avenir.

mardi 14 septembre 2010

Boris with Ian Astbury / BXI























Encore un truc incroyable. L’autre actualité de Boris c’est BXI, autrement dit un mini album enregistré en collaboration avec Ian Astbury… Allez, pourquoi pas ? Ne soyons pas intolérants. Respectons l’aventure musicale. Ouvrons bien grand nos oreilles émerveillées et fermons un peu nos gueules de snobinards prétentieux et constipés. Et puis, après tout, Ian Astbury et son groupe The Cult font bien partie de mes héros de jeune adolescent – pas très longtemps c’est vrai, je les ai laissés tomber lorsque le groupe s’est mis à lorgner vers le marché des hamburgers et à faire du mauvais hard rock et ce dès Electric, son troisième album en 1987.
Mais revenons à BXI et à ses quatre titres. Teeth And Claws et We Are The Witches ne sont que deux gros loukoums débordant de tous les pires tics queer metal dont Boris comme Astbury sont capables et dont on aurait bien voulu qu’ils se débarrassent pour une fois. Cela aurait été bien trop beau et à côté Mötley Crüe passe obligatoirement pour un ramassis de dangereux visionnaires. Le pire reste Magickal Child. Une fois que l’on a dit que ce titre est un slow – de nos jours on parle de balade, cela fait moins péjoratif – il n’y a plus rien à ajouter. A la poubelle avec les deux premiers. Mais ce n’est toujours pas fini. En troisième position du disque on trouve une reprise de Rain, titre emblématique des Cult, sur leur album Love en 1985. Non seulement l’interprétation musicale laisse une nouvelle fois à désirer mais qui plus est c’est Wata, la guitariste de Boris, qui anone ici dans un registre proche de celui que moult chanteuses de variété française diaphanes sans voix et sans poitrine affectionnent tant. On peut toujours faire pire que le pire est la seule conclusion qui s’impose après une telle séance de torture.
BXI serait le premier signe d’un album entier de Boris et Ian Astbury à paraitre. J’espère sincèrement que ce jour funeste n’arrivera pas. Je ne comprends pas non plus comment Southern Lord, le label habituel de Boris, a accepté de se laisser faire et de publier une telle daube malodorante : il n’y a rien à sauver sur ce mini album et la plus élémentaire des politesses, l’argumentation raisonnée, l’analyse circonspecte ne sont plus de mise pour décrire ce que faute de mieux on qualifiera de gros paquet de merde. Tant pis pour la déontologie – je plaisante : je n’en ai jamais eu, je ne suis pas assez hypocrite pour cela – et tant pis pour Boris, groupe qui a produit de très bonnes choses dans le passé mais qui ne fait que confirmer ici son inexorable dégringolade. Quant à Ian Astury on s’en fout, qu’il retourne déterrer le cadavre de Jim Morrison pour payer ses fins de mois difficiles.

lundi 13 septembre 2010

Boris - Torche / Chapter Ahead Being Fake























Boris… il y a bien longtemps que l’on a parlé de ces japonais capables du pire comme du meilleur. Et encore, même le pire – à savoir le heavy bublegum/metal karaoke dont lequel se vautre le groupe depuis quelques albums – trouve grâce à mes yeux. Un pécher mignon. Les voilà à nouveau dans l’actualité avec un split 10’ en compagnie de Torche. Dans les faits ce disque est disponible au pays du soleil levant depuis plus d’une année en format CD via le label japonais Daymare. Hydra Head devait donc s’occuper du reste du monde mais a quelque peu trainé la patte, échaudé par la sortie prématurée du disque au Japon qui a eu pour principale conséquence de voir les deux inédits de Boris et de Torche se retrouver sur tous les réseaux de peer to peer avant même la parution du vinyle. C’est aujourd’hui chose faite et question présentation Hydra Head a mis le paquet, redoublant d’ingéniosité dans le mauvais goût (cette pochette orange, rose et violette !) car souhaitant tout de même défendre son poulain, Torche, qui vient tout juste de publier un mini LP récréatif et sortira un album entier (très attendu) un peu plus tard.
Disons tout de suite que
Luna, long titre dépassant les 12 minutes et proposé par Boris, frise la catastrophe plus d’une fois. Un titre épique mais qui se perd dans les méandres d’une composition sans but apparent et qui est également dispersé aux quatre vents par un mix incompréhensible qui loin d’arranger les choses amplifie l’impression de coquille vide. Les voix sont particulièrement mal gérées – encore plus mal que d’habitude – et on aimerait entendre autre chose que cette batterie écœurante en mode blast beat du pauvre. Le solo de guitare est tout aussi affreux et si Luna n’avait pas duré aussi longtemps, on aurait par pure pitié convenu que tout ceci n’est qu’une très mauvaise blague. Carton rouge pour Boris.
De l’autre côté,
Torche fait au contraire le carton plein avec King Beef. Moment plutôt décisif puisque ce titre est le premier publié avec le line up du groupe réduit à trois depuis le départ du guitariste Juan Montoya en 2008. Gros son, batterie tribale, riffs fondus dans les hauts fourneaux du diable, lourdeur entrainante du panzer dévastant l’arrière pays polonais et chant harangué, King Beef a tout du hit mais est à mille lieues du bitch metal de l’album Neanderthal. Bien plus sombre. Bien plus méchant. C’est fini de rigoler. King Beef aurait ainsi pu constituer un excellent présage pour le nouveau mini album de Torche, Songs For Singles, mais aux dernières nouvelles il n’en serait rien, ce qui n’est finalement guère surprenant avec un nom de disque pareil qui laisse avant tout penser que Torche n’en a pas tout à fait fini avec la grosse poilade.

samedi 11 septembre 2010

Knut / Wonder























Avec Wonder, Knut ne déroge pas à la règle : ce groupe est tout simplement unique et monstrueux. Et pour celles et ceux qui avaient regretté les changements et tournants trop atmosphériques opérés sur Terraformer, le précédent album paru en 2005, ainsi que les errements d’Alter, l’album de remix et réinterprétations publié l’année d’après, qu’ils soient tout de suite rassurés : Knut – ça se prononce [qunoute], cela a le mérite de faire rire les fans du monde entier, quelle que soit leur langue maternelle – Knut donc revient à des compositions plus touffues, plus construites, plus violentes, plus lourdes et surtout plus chantées.
Toujours emmené par Roderic, ce batteur vraiment incroyable et impressionnant qui joue les trucs les plus hallucinants au monde avec une aisance et une zenitude de moine-guerrier Shaolin, Knut ne nous laisse pas vraiment le choix : avec Leet, Damned Extroverts, Suckers et Calamity, véritable carré d’as de hardcore chaotique ouvrant la première face de l’album, le groupe rassure et en même temps appelle à la bienveillance complice – oui c’est bien Knut que nous écoutons, le grand et irremplaçable Knut… que demander de plus ? De l’originalité ? Knut est justement l’un des inventeurs historiques de la musique qu’il joue alors n’en parlons même pas. Ou plutôt si, parlons-en : si ces cinq garçons n’avaient été qu’un ramassis de bouseux éthyliques, amateurs d’armes à feu et originaires d’un bled du Middle West américain et non pas tout simplement un groupe suisse basé à Genève, Knut serait devenu le groupe de metal core le plus important de la planète et non pas un groupe bénéficiant de l’admiration de ses pairs et d’un succès d’estime de la part des connaisseurs. Ce n’est donc pas peu dire que le bien nommé Wonder remet les pendules à l’heure, même si c’est aussi peut être trop tard et même si certains savaient déjà.
Le point de non retour et d’accablement hystérique semble être atteint avec Calamity, titre à la densité et à violence vitales telles qu’à sa toute fin Knut nous a déjà épuisés de bonheur. Et, encore une fois, que demander de plus ? Toutes les réponses dont Knut est capable se trouvent dans Ultralight Backpacking : toujours aussi glacial et intraitable, le metal de Knut y troque sa frénésie contre l’inquiétude, la frontalité contre les sables mouvants. Dès lors – si on excepte la dernière poussée tribale que constitue LemmingsWonder bascule dans le mid-tempo torturé (Fast Forward Bastards) voire le ralenti extrême (If We Can’t Fly There, We’ll Take The Boat) pour finir dans les bras d’un post hardcore ultra convainquant c'est-à-dire sans pathos ni mélodrame (Wonder/Daily Grind). Alors que son tempo s’est considérablement ralenti, le hardcore de Knut s’est élevé dans les airs, non sans flirter avec un certain mysticisme en réalité bien difficile à définir. Wonder est bien un pur joyau et l’un des albums de l’année 2010. Dommage que pour la parution de celui-ci le groupe soit passé de Hydra Head à Conspiracy records, label tout aussi méritant mais internationalement moins « visible ».

vendredi 10 septembre 2010

Celeste / Morte(s) Née(s)























Même pas eu le temps de s’appesantir sur Misanthrope(s), précédent album de Celeste paru en 2009, que le groupe, fidèle à sa réputation de stakhanovisme et de prolixité (quatre albums en quatre années), a déjà remis ça avec Morte(s) Née(s) publié encore une fois par Denovali avec autant de pressages différents que l’on peut en imaginer*… Alors, est ce que Celeste en fait trop ? Les lyonnais frisent régulièrement le ridicule – le côté désespérément littéraire/poétique des textes en français, les titres des albums, les illustrations des pochettes des disques, l’esthétique générale que dégage tout ça – mais à dire vrai pas plus qu’un groupe de black metal bioéthique et champêtre ou qu’un groupe de hardcore existentialiste. Celeste se situe justement entre les deux, c'est-à-dire nulle part pour certains et ailleurs/au dessus de tout pour les autres. Morte(s) Née(s), superbe double LP (trois faces de gravées, la quatrième est muette), devrait définitivement donner raison à ces derniers.
Misanthrope(s)
était un album un peu embarrassant, bourré de trop d’intentions, blindé d’armes de destructions massives et finissant par tourner à vide. Qui trop embrasse mal étreint. Pour Morte(s) Née(s) Celeste a resserré les rangs et, sans rien changer de fondamental à son propos et à ses façons de faire, a réinsufflé une bonne dose de dynamisme et de croyance à son post hardcore qui avait tendance à virer à l’autocomplaisance et au narcissisme – mais vouloir à la fois être bien vivant, désespéré, meurtri et beau est une chose bien difficile à réaliser, non ? Sept titres seulement, 41 minutes de chaos uniquement (l’édition en double LP permet de proposer un bel objet mais surtout un excellent pressage qui restitue toute la force du son du groupe) et Celeste est instantanément relancé sur la piste aux étoiles. Noires, les étoiles.
Le groupe propose avec un succès à nouveau irréprochable un mélange certes désormais convenu mais terriblement efficace de black metal mid tempo et de post hardcore c'est-à-dire exactement tout ce qu’il faut pour s’arracher les tripes et le cœur d’un seul et unique coup de dents rageur. Les sanglots sont toujours là, la mitraille aussi mais les quatre lyonnais arrivent à atteindre l’essentiel c'est-à-dire une pureté et une brutalité musicales qui font oublier tous les apparats dont Celeste ne se débarrassera sans doute jamais (mais ne revenons pas une nouvelle fois sur l’esthétique du groupe). Derrière cette réussite formelle, pointe une sincérité à toutes épreuves** qui atteint donc son but et vous trimbale, pantelant, entre les parois d’un tunnel abandonné tel un passe-muraille qui aurait perdu tous ses pouvoirs***. Sans être outrageusement perturbant Morte(s) Née(s) est donc un bon album qui voue remue les tripes.

* le mien est tout blanc avec des traces de goudrons échappées des poumons d’un fumeur atteint d’un cancer en phase terminale
** une condition nécessaire pour viser et toucher juste et fort mais pas une condition suffisante, car lorsque tu joues de la merde c’est définitivement de la merde
*** oui, c’est de la poésie

jeudi 9 septembre 2010

Ntwin / self titled























On avait laissé Ntwin, trio marseillais, sur une impression quelque peu mitigée suite à la parution d’un split LP partagé avec les excellents Jubilé. Impression mitigée certes mais suffisamment bonne pour donner envie d’écouter la suite. La suite la voici déjà avec un nouvel album sans titre. Les dix compositions qu’il regroupe sont issues de la même session que celles du split mais cette fois ci les choses ont – techniquement – été bien faites : pas de problème de niveau du son ou de mastering, on peut entendre parfaitement toutes les choses que Ntwin a à nous dire. Et ces trois petits gars* en ont justement quelques unes en réserve.
Qui dit trio guitare/basse/batterie et voix dit… noise rock ? Effectivement. Il n’y a aucun doute à avoir là-dessus. Ntwin s’y connait pour énergiser et batardiser une musique que l’on pense pourtant connaître sur le bout des doigts. Les tempos sont variés – j’ai une petite préférence pour les lents – mais toujours nerveux, la guitare cisaille, grésille et dissonne avec art (le final de Sixty Fingers, l’intro de Tsunami ainsi que plein de passages disséminés tout au long du disque et prenant régulièrement l’auditeur au dépourvu) alors que la basse ratatine sans mal toutes velléités de joliesse et de préciosité. Or de la distinction il y en a une bonne dose dans la musique de Nitwin qui, même si on imagine que le groupe a sciemment souhaité piocher ici ou là quelques exemples éprouvés et admirés pour nous les ressortir aujourd’hui, se démarque aisément de la meute des imitateurs et distille son truc à lui avec tout le naturel et toute la décontraction dont ces trois musiciens sont capables. On finit même par se demander de quels exemples et de quelles références on parle. A la découverte et à l’abordage les gars !
Les lignes de chants et les voix (il y en a deux) sont les plus étonnantes. Impossible de ne pas sourciller de bonheur lorsque sur West Head ou Red Cars ce chant étrangement aigu au service de lignes tordues et improbables fait son apparition. La palme revient certainement à Ape, vraiment déstabilisant avec ses feulements séducteurs de chatte en chaleur. Si le groupe a bien conscience de l’intérêt et du décalage offert par un tel chant, il n’en abuse pas non plus, les voix étant la plupart du temps alternées ou tout simplement à l’unisson. La ligne de chant la plus réjouissante et la plus réussie est celle de Boy : c’est un ami du groupe qui est venu prêter main forte et le résultat, pourtant tout simple, est vraiment incroyable de justesse – ça ne veut pas dire qu’il chante juste, bien que cela semble effectivement être le cas, mais qu’il touche juste – et depuis je me demande dans quelque groupe peut bien jouer cet invité mystère.
Autre façon intelligente de varier les positions, les compositions ont beau être courtes, Ntwin ne s’éternise jamais sur un même registre : ainsi Red Cars qui commence comme une compo punk assez basique se retrouve lardée de breaks noisy justement soutenus par le chant aigu. Dans le même genre d’idée, Ntwin navigue avec aisance sur plusieurs styles d’un titre à l’autre (You’re In, lent et obsédant, succédant à un We Don’t Need très punk et direct) mais la musique du groupe n’en est pas un immense foutoir pour autant. On en revient à la désinvolture, à l’absence de complexes et à la fraîcheur évoquées plus haut. Le résultat c’est que ce groupe de Marseille est tout simplement une sacrée bonne petite découverte.
[comme pour le split avec Jubilé, ce sont Boom Boom Rikordz et Katatak qui ont par leurs efforts permis la publication de cet excellent disque à ne rater sous aucun prétexte]

* dont une fille

mercredi 8 septembre 2010

Grand Prédateur / self titled























Gros acte de contrition. J’ai beau rechercher et fouiller dans les moindres recoins de mon agenda de ministre, je ne trouve nulle part à la semaine 19 – comme on dit chez les gens très importants et très occupés – la trace d’un éventuel concert auquel j’aurais pu me rendre par ailleurs et qui expliquerait mon injustifiable absence du jeudi 13 mai 2010 à Grrrnd Zero pour assister à celui de John Makay et de Grand Predateur*. Rien. Cette semaine là, je n’ai absolument rien foutu. Je n’avais même pas à respecter le sacro-saint règlement intérieur qui stipule sans exception aucune que je n’ai l’autorisation d’assister qu’à un seul concert par semaine (les six autres jours je torche les gosses et je fais la vaisselle). Mais si je n’ai vraiment aucune excuse pour cette faute grave j’ai par contre plein de bonnes raisons d’aborder le sujet du disque de Grand Prédateur.
Je pensais à tort que ce duo originaire de Rouen n’était qu’un énième groupe de rock mathématique, comme c’est dûment indiqué sur leur monospace impérialiste. Les descriptifs sont souvent trompeurs, les chroniques de disques n’en parlons même pas, mais il n’est pas besoin d’avoir son brevet des collèges pour comprendre – dès les premières notes de Requin Blanc – que Grand Prédateur ne joue absolument pas du math rock. Ou alors non seulement ils ne savent pas compter mais en plus ils sont nuls en français. Pour ce qui est de la langue justement, cela tombe bien parce que le type qui braille des insanités derrière son micro fait tout pour que l’on n’y comprenne rien, c'est-à-dire exactement comme j’aime (l’autre voix se révèlera plus dans le registre canard défoncé à l’hélium, ce qui est tout aussi bien).
Dès lors la machine Grand Prédateur est lancée et le duo nous assène un diptyque Scott Kelly On A Horse/Over The Top qui résume à lui tout seul la musique de ce groupe et ce disque qui dès qu’il passe dans la boite à musique familiale transforme mon petit confort pépère en champ de foire (d’empoigne) dévasté par une tornade imprévisible. Ces deux là jouent vite et fort – et millimétré, malgré la bave et la sueur qu’ils répandent au sol, c’est sûrement pour ça qu’ils entendent être plus matheux que la moyenne – et ne laissent aucun répit. Les premières écoutes de ce 10 pouces sans titres sont ébouriffantes, les suivantes le sont tout autant bien que l’on ait entretemps saisi toutes les ficelles et tous les trucages de Grand Prédateur mais on s’en fout, le mal est fait et bien fait. Rien à en redire : les compositions courtes et incisives démontrent une parfaite maîtrise de la science du riff qui tue et du rythme qui tabasse**, le tout sur fond de gros son qui bave.
Et si rien ne remplacera un concert, on peut toujours se procurer cet excellent disque auprès des activistes suivants : Emergence records, Ocinatas Industries, Et Mon Cul C'est Du Tofu ? et même chez Arrache Toi Un Œil ! qui en plus a réalisé la sérigraphie de la pochette.

* d’un autre côté, depuis que j'ai lu que le concert lyonnais a été écourté, j’ai beaucoup moins de regret (une lecture intégrale du report montre que cette tournée de la mort n’a vraiment pas été facile)
** à défaut d’être mathématique le hardcore de Grand Prédateur est contrepètrique, remplaçant la liturgie du Stabat Mater par celle du Tabasse Ta Mère

mardi 7 septembre 2010

Heliogabale / Blood


Je crois que la fois où Sasha Andrès, chanteuse d’Heliogabale, s’est saisi d’une canette de bière à moitié vide et, dans un geste brutal et un peu théâtral, l’a jetée droit devant elle et que cette cannette et son contenu me sont arrivés directement dessus, je crois que cette fois là constitue l’un de mes meilleurs souvenirs de concerts. Non pas que j’aime bien me prendre des objets divers et variés dans la gueule lorsque je vais quelque part pour écouter de la musique mais cette tentative désespérée de faire réagir un public lyonnais bien trop clairsemé et peu attentif à la musique d’Heliogabale – le groupe venait de publier son deuxième disque, le mini album To Pee – ne m’a pas fait broncher d’un iota, tout hypnotisé que j’étais par le quatuor et sa musique.
C’était la première fois que je voyais les parisiens en concert et ils avaient tout fait pour justifier leur réputation énervante de parfait groupe prétentieux, à commencer par la robe de soirée noire très classe de Sasha Andrès et le logo des Cahiers Du Cinéma étalé en très grand sur la grosse caisse de la batterie. Le groupe jouait à fond ses hymnes noise rock et décadents, Billy The Silly, Naked Blue ou Bone Structure Matters. Il y avait peu de groupes aussi violents et aussi commotionnant qu’Heliogabale. Il n’y en a toujours pas beaucoup.
Je ne comprendrais jamais pourquoi ces quatre musiciens n’ont pas eu davantage les honneurs d’une scène française particulièrement bouillonnante dans les années 90. Heliogabale faisait partie des meilleurs. Ou plutôt je ne le comprends que trop bien : une discographique erratique, un album (Mobile Home) particulièrement incompris à sa sortie (alors qu’il est en tous points excellent, son seul tort était d’être trop différent de ses prédécesseurs), des apparitions en concert plutôt rares, un silence de plus de cinq années avant un retour fracassant et un album gigantesque en 2004 (Diving Rooms) et une certaine perversité à jouer d’une aura arty et hautaine – que voulez vous les gens n’ont aucun humour ni aucun sens du sarcasme, particulièrement les punks et les incultes.























Nouveau silence. En 2009 Heliogabale fait savoir que le groupe a à son actif suffisamment de compositions prêtes et déjà enregistrées – Heliogabale en auraient 21, seules 10 vont être retenues pour le nouvel album – pour pouvoir enfin sortir un nouveau disque et le groupe lance donc un appel aux labels éventuellement intéressés. Quelle misère. Finalement ce sont deux structures activistes et désormais incontournables du paysage musical local qui répondent présent : le collectif A Tant Rêver Du Roi et Les Disques Du Hangar 221, les premiers s’occupant de la version vinyle*, les seconds de la version CD.
Ce nouvel album tant attendu d’Heliogabale s’appelle Blood. Sa parution officielle est prévue pour le 15 septembre prochain. Autant dire que comme à chaque fois avec Heliogabale, le groupe ne s’est pas contenté de refaire à l’identique ce qu’il avait déjà gravé sur ses précédents disques. On retrouve bien sûr la patte d’Héliogabale, dès le premier titre du disque, Q For Qing et son noise rock vampirique et lancinant, conduit par une ligne de basse tournante comme le groupe en a le secret**. On retrouve également la voix incroyable de Sasha Andrès, tour à tour rauque et venimeuse, passant de l’inquiétant à des choses plus virevoltantes et papillonnantes (Ô My Friends, Zigzag). Mais pour celles et ceux qui aimeraient réentendre encore une fois le nihilisme sanglant des débuts du groupe ou la recrudescence rageuse de Diving Room, le mieux est d’aller directement réécouter les disques concernés. Car Blood, malgré son nom, est un album calme, très mid tempo, pas vraiment bruyant mais flirtant avec bonheur avec une indie-pop classieuse et impériale (Foolish If). Il n’y a pas de dérapages hystériques ni d’explosions soniques ici mais une collection de chansons aussi basiques qu’évidentes, des compositions qui tournent autour de deux ou trois idées simples mais percutantes, un songwriting de haute volée.
Knocked Out
est l’un des sommets de Blood. Heliogabale y distille un blues lancinant, hanté par la ligne de chant et la voix grave de Sasha Andrès, un titre qui n’est pas sans rappeler certains accents d’Oxbow et d’Eugene Robinson. On note également sur ce même Knocked Out ainsi que sur deux ou trois autres titres l’apparition d’un saxophone, il s’agit de celui de Raul Colosimo***. Juicy Fruit et Drink This Jab réjouiront pour leur part les éventuels grincheux qui trouvent Blood un brin trop pop mais cela n’empêche pas Heliogabale d’y faire toujours preuve d’une certaine retenue, si tension il y a elle est sous-jacente, insidieuse et d’ailleurs c’est bien sur ce terrain là que joue également Rewind, superbe conclusion d’album, avec son lyrisme acide et son émotion palpable.

* une grande première pour Heliogabale puisque mis à part Billy The Silly publié sur un split single avec The Crooner Of Doom et les deux titres du groupe en compagnie de Didier Petit sur le LP File Under Music publié en 1996 par le label Rectangle, Heliogabale n’avait jamais sorti de vinyle
** malheureusement Viviane Morrison, qui joue sur Blood, a depuis quitté Heliogabale et il sera remplacé par Brice Pirotais des Hurleurs
*** il joue dans un duo appelé Map Jazzy ainsi que dans MysterYProd, un groupe plus protéiforme auquel a déjà collaboré Philippe Thiphaine, guitariste d’Heliogabale

lundi 6 septembre 2010

Oui, c'est la rentrée...
























Cette fois ci ça y est vraiment, les rues sont à nouveau blindées de voiture en stationnement, les bus dégueulent à nouveau de gens pressés ou blasés, les gosses sont retournés à l’école, leurs pleurs et leurs cris de joies se mêlent en une seule et même musique : celle de la rentrée de septembre, ce truc pour l’instant assez excitant pour eux puisqu’il est toujours synonyme de nouveautés et de changements mais qui risque de finir comme l’éternelle litanie des choses qui recommencent sans cesse, celle de l’ennui harassant.
Dès que je croise une tête pas vue depuis quelques semaines j’ai toujours cette conversion : « ça va ? ouais c’est la rentrée, quoi ». C’est la rentrée. Bien peu sont en mesure de me dire qu’ils ont fait un truc excitant – aller passer ses vacances dans un hôtel en Tunisie au bord d’une piscine pompant toute l’eau des nappes phréatiques dont les paysans du coin auraient pourtant bien besoin pour arroser leurs cultures vivrières ne fait pas partie des trucs excitants – et bien peu aussi ont des envies et des idées qui leur allument une petite lumière au fond du regard. Les gens ne sont même plus fatigués, résignés ou anesthésiés (tu veux une autre piqûre de politique sécuritaire dans le cul pour te faire passer le goût de la vie ?), les gens disparaissent. Ils disparaissent dans ce modèle de société qui ne cherche même plus à cacher ses atours totalitaires, sous un vernis démocratique. Friendly Fascism est le titre d’un album de Consolidated qui date déjà de 1991. Moi aussi j’ai décidé de disparaître, mais pas de la même façon : je ne suis pas retourné travailler au jour et à l’heure où j’aurais du le faire. Renoncer à son travail et à sa rémunération mensuelle n’a rien à voir avec le courage, la vie est juste ailleurs même si la vie demain risque d’être difficile et compliquée, pour d’autres raisons évidemment. On verra bien.

















C’est la rentrée et c’est surtout le premier concert de cette rentrée. J’y vais en courant à ce concert, pour une seule et bonne raison : écouter et voir de la musique en live me manque. Et puis revoir les amis du Sonic. La soirée va être chargée : l’association organisatrice a programmé quatre groupes ainsi qu’un mix pour la fin. Il y a déjà du monde lorsque j’arrive sur la péniche, la soirée s’annonce belle.
Les Blondettes sont les premiers à jouer. Contrairement à ce que le nom de groupe indique il n’y a qu’une seule fille dans le groupe et en plus elle est loin d’être peroxydée. J’ai la surprise de constater que le bassiste/guitariste du groupe est un garçon qui joue en solo sous le nom de Ludivine Cypher et qui organise régulièrement des concerts au Grrrnd Zero. Il vient d’arriver dans Les Blondettes, c’est son premier concert avec eux et je n’arrive pas à comprendre s’il remplace définitivement le bassiste qui jouait jusqu’ici avec le groupe ou si le future line-up sera de quatre membres.
Qu’importe, je suis très agréablement surpris par la musique de ces trois là, pourtant je n’ai pas particulièrement une âme de midinette mais la pop dynamique et virevoltante des Blondettes est séduisante. De la mélodie évidemment, des plans tordus subtilement glissés ça et là, une bonne rythmique et surtout une chanteuse/claviériste qui chante foutrement bien de sa voix aigue et exaltée des paroles en anglais et en espagnol qui ne semblent pas manquer de piquant. Presque malgré moi je me sens devenir son hijo de puta.
























C’est non sans une réelle curiosité et un plaisir non feint que j’assiste ensuite à mon premier concert de Raymonde Howard. Après avoir consulté mes tablettes je me suis aperçu que je l’ai déjà vue sur une scène avec l’un de ses groupes (La Seconda Volta) mais jamais toute seule. Ce soir elle joue sans son batteur mais cela me va aussi bien comme prise de contact. Je ne suis pas très objectif puisque son album For All The Bruises Black Eyes And Peas a longtemps figuré dans ma playlist mais j’ai aussi un peu peur, récalcitrant que je suis aux concerts unipersonnels de pop/folk. J’ai toujours peur de m’emmerder un peu, voilà le genre de musique que je préfère écouter seul et pas dans une salle de concert.
A l’aide de deux micros, d’une guitare, de petites percussions et bien sûr de sa loop station Raymonde Howard va passer en revue son album, nous gratifier d’une nouveauté (un titre réussi sur fond de beat électro) et même tenter l’inconcevable : une reprise du Ace Of Spades de Motörhead. C’est qu’elle a eu la curiosité d’aller écouter la musique de Purple Rhinestone Eagle – le dernier groupe qui jouera ce soir – et elle explique que cela lui a donné quelques idées/envies. Reprenant uniquement le gimmick à la guitare ultra célèbre de Fast Eddie Clark, chantant seulement le premier couplet (elle ne se souvenait pas vraiment des paroles originales pas qu’importe, vu la débilité de celles-ci) et tordant le refrain dans son style bien à elle.
Mais le plus beau reste ses propres compositions, des compositions d’une évidente simplicité et d’une vérité touchant toujours juste. Des plus entrainantes – The Raincoats Are Here – aux plus intimistes – Almost Go Unnoticed. Et une vraie belle voix. Et une présence assez incroyable. Incroyable cela veut dire que l’on ne sait pas à quoi ça tient mais que l’on s’en fout. Je crois aussi que Raymonde Howard est l’une des rares musiciennes qui me donne envie de m’intéresser aux paroles de ses chansons, chose que j’ai la mauvaise habitude de ne jamais faire.

















C’est le tour de Sida, groupe dont j’entends beaucoup parler actuellement. Je n’ai pas assisté aux concerts que le trio a donné ces derniers temps au Grrrnd Zero, concerts qui ont eu l’heur d’emballer quasiment tout le monde qui a pu s’y rendre, mis à part les habituels métallurgistes pyschorigides. La musique de Sida serait un croisement entre no wave et noise rehaussé d’un synthé cheap et surtout Sida ce serait un bordel punk aussi dynamique que jouissif. Les quelques extraits entendus et vidéos mal cadrées postées ça et là me laissent entendre que Sida est une sorte de Drunkdriver local, c'est-à-dire un groupe jouant à fond la carte de la saturation et du chaos. Ce qui n’est pas pour me déplaire.
Malheureusement je n’ai presque pas pu entendre une seule note du concert de Sida, la faute à un guitariste complètement à la ramasse jouant tellement fort que l’on entendait ni la batterie, ni le chant, ni le synthé. J’avais beau faire des efforts, je n’y arrivais pas et faire des efforts (autres que ceux de bouger son cul ou de headbanger comme un décérébré) lorsque on assiste à un concert c’est peine perdue. Ça veut juste dire que je n’aime pas ou que c’est mauvais. Des voix s’élèvent dans le public pour expliquer au garçon qu’il fait vraiment n’importe quoi, même l’un des deux boss du Sonic s’y met pour lui demander de baisser son ampli, les deux sondiers trépignent derrière la console car ils ne peuvent rien faire pour arranger les choses (en fait si : ils ont tout simplement coupé la guitare sur la table mais cela n’a fait aucune différence), mais le guitariste en question semble ne pas comprendre, continuant dans son trip et crucifiant son groupe sur place avec sa mélasse inaudible de six cordes. Il jouait sur l’ampli de la guitariste de Purple Rhinestone Eagle et ce jouet devait être trop gros pour lui. Un vrai gaspillage et un foutage de gueule tellement stupide et vain qu’il s’annulait tout seul, de lui-même. Si je veux écouter du harsh je préfère aller à un concert de Merzbow
Je le regrette car la chanteuse/claviers/guitariste a l’air d’avoir une sacrée personnalité – elle porte un t-shirt Birthday Party ce qui en soi ne veut pas dire grand-chose, même moi j’en ai un dans mon placard, mais surtout en fin de soirée elle mixera quelques disques, faisant preuve d’un goût aussi sûr que certain – et que le batteur est plutôt mignon avec ses frisettes blondes. Il me faudra donc revoir Sida dans d’autres conditions pour savoir ce que je pense d’un groupe jouant une musique dont je devrais a priori être client. En attendant je sors dehors (comme 90% de la grosse centaine de personnes composant le public) pour boire des bières. C’est toujours ça de gagné.

















Après ce concert merdique de Sida, n’importe quoi aurait pu convenir pour se refaire les dents. Purple Rhinestone Eagle n’est à proprement parler pas n’importe quoi mais un trio de filles jouant un heavy rock bien gras et orienté seventies. Ah ouais, dans ces cas là j’hésiterais presque à dire que ces trois filles jouaient à burnes un rock couillu mais c’était pourtant bien ça : des filles tatouées, poilues, transpirantes et furieuses, exactement comme je les aime.
Après nous avoir fait le coup du morceau speedé en ouverture, Purple Rhinestone Eagle a aligné des titres plus lents mais toujours très efficaces. Le son est énorme – dans le bon sens du terme – et dopé à la bigmuff. La batteuse a des arguments de poids, la bassiste tabasse comme une brute épaisse sa Rickenbacker noire (elle porte un épais bracelet en cuir pour protéger son avant-bras) et la guitariste prend le temps de quelques soli et idées qui assurent toute la fraîcheur et l’intérêt d’une musique qui sans ça risquerait de passer pour bien banale. Banale elle ne l’est donc pas.
En deuxième partie de set les Purple Rhinestone Eagle haussent le ton et le rythme et glissent d’un registre tendance Led Zeppelin/Black Sabbath à celui plus proche d’un Motörhead (nous y revoilà) tout en gardant la touche 70’s. Les filles s’excitent, les garçons font dans leurs culottes, le Sonic baigne dans la transpiration, une certaine idée du bonheur. Et je sens que je me transforme en chaudasse hystérique moi aussi. Sur disques Purple Rhinestone Eagle me semble nettement moins bon mais en concert le groupe à toute la générosité et l’énergie que l’on est en droit d’attendre d’un power trio basique. Ça défouraille velu et c’est le truc parfait pour passer un excellent moment en concert. Allez les filles !